Le 12 mars 2020, le gouvernement brésilien a annoncé la vente pour démantèlement du seul porte-avions de sa marine, le São Paulo. Le navire, initialement français sous le nom Foch, accomplira sa dernière transatlantique au cours des prochains mois en direction de la Turquie.
Dans l’histoire de la marine, le Charles de Gaulle n’est pas le premier des porte-avions français. Du Bapaume au futur PANG, nos porte-avions se sont succédé dans la lourde tâche d’assurer la capacité de projection d’aéronefs français aux quatre coins du globe. Depuis les années 1960 jusqu’en 2000, cette mission était confiée à deux bâtiments de la marine : le Clemenceau, désarmé en 1997, et le Foch. Ironiquement, s’il s’agit du deuxième bâtiment portant le nom du maréchal, celui-ci avait pourtant déclaré en 1911 que : les « aéroplanes (…) ne présentent pas de valeur militaire ».
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Du Foch au São Paulo
Le Foch a été inscrit à la liste des bâtiments de guerre de la marine pendant près de 37 ans. En 2000, il ne fut pas décidé de le désarmer et de le démanteler, mais de le vendre. La transaction d’un montant de 90 millions de francs (soit un peu plus de 12 millions d’euros) est actée le 15 novembre 2000, au bénéfice de la marine brésilienne. Le São Paulo (ex-Foch) venait remplacer le Minas Gerais, bâtiment de conception britannique (ex- HMS Vengeance) en service depuis 1945 dans la Royal Navy racheté par le Brésil en 1956. D’après des propos de l’analyste Alex Pape recueillis par Le Point : « L’expérience d’opérer un ancien bâtiment racheté à une autre marine était bien présente chez les Brésiliens, mais ils ont peut-être sous-estimé la complexité et le coût de maintenance du Foch ». En effet, à la liste des navires rachetés par la marine brésilienne on compte, en plus du São Paulo et du Minas Gerais, leurs quatre frégates de Type 22 et la majorité de leurs navires d’assaut amphibies.
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Une succession de réparations de plus en plus coûteuses
En tant que bâtiment de guerre de la marine brésilienne, le São Paulo compte peu de jours en mer à son actif, quelques 206 jours selon le site brésilien Airway. En revanche, on ne compte plus les heures passées à quai pour l’entretenir. Toujours selon Le Point, ce sont plus de 100 millions d’euros qui ont été investis dans le navire. Et si de gros travaux de rénovation ont eu lieu entre 2005 et 2009, l’âge avancé du bâtiment aurait encore dû nécessiter d’importants travaux de modernisation pour qu’il reste opérationnel. Par ailleurs, deux incendies majeurs, l’un en 2005 et l’autre en 2012, ont lourdement touché le navire. Selon le site Opex 360, une modernisation complète du navire fut envisagée un temps par la marine brésilienne. Étaient notamment prévue « l’installation de nouvelles catapultes, d’un système de propulsion neuf et d’un système de combat modernisé. Naval Group était d’ailleurs sur les rangs pour ce marché alors évalué à 250 millions d’euros. ». Cette remise à niveau aurait permis au bâtiment de rester en activité jusqu’en 2039, date à laquelle il aurait fêté sa 79e bougie. En 2017, compte tenu des contraintes budgétaires, il est décidé d’abandonner ce projet et de déclasser le bâtiment.
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Une dernière transatlantique direction la Turquie ?
Le navire est finalement revendu le 12 mars dernier à une société turque, Sök Denizcilik, pour une somme d’un peu plus d’1,6 millions d’euros. Cette société, spécialisée dans le démantèlement de navires, a bénéficié d’un ajout à la liste européenne des installations de recyclage de navires par une décision de la commission en date du 22 janvier 2020. Dans le contrat de vente du Foch au Brésil, une clause disposait que le démantèlement du navire devait se faire par une entreprise agréée par l’Union Européenne.
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Ayons en mémoire la rocambolesque histoire du jumeau du Foch, le Clemenceau, qui erra des mois durant en mer sans atteindre l’Inde, son lieu de démantèlement prévu. Le navire, vendu en 2003 afin d’être recyclé, ne sera finalement démantelé qu’en 2010 par une société britannique.
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