Un mode opératoire furtif
Ayant recours à des escouades en pick-up dotés d’armes légères et de ceintures explosives en dernier recours, les troupes de l’État Islamique sont très mobiles et leurs attaques sont dévastatrices. « Ne vous y fiez pas, Daesh préserve ses forces » annonce dans un communiqué le général Paul Lacamera, commandant de la coalition anti-EI. « Ils ont pris des décisions en calculant ce qui leur reste de forces vives et de capacités pour tenter leur chance dans des camps de déplacés et en allant dans des zones reculées. Ils attendent le bon moment pour resurgir » ajoute-t-il. Pouvant compter sur plusieurs groupes affiliés, le groupe État Islamique dispose de relais et de combattants afin de prolonger son combat idéologique en Égypte (Sinaï), en Libye, en Afrique ou encore en Asie (Afghanistan, Pakistan, Indonésie…). L’ensemble de ces cellules actives ou dormantes assurent au groupe terroriste une capacité d’action non négligeable dans les zones où il est présent et notamment en Irak où, chaque mois, des dizaines de personnes sont tuées.
Un réseau international
S’étant préparé depuis le début à son retour dans la clandestinité, l’État Islamique souhaite une internationalisation du conflit. Il ne se contente pas de quelques poches au Proche et Moyen-Orient. C’est dans cet objectif qu’il a procédé à un transfert de cadres, de combattants et de fonds rejoignant ceux déjà sur place dans un unique but de répliquer leur stratégie à l’étranger. De fait, le sort d’une partie de ces vétérans du djihad est peu connu. Une bonne partie d’entre eux est décédée dans les combats, une autre a été capturée ou exfiltrée dans la poche d’Idlib, mais une autre encore a réussi à fuir dans les régions avoisinantes, voire réussi à rentrer dans son pays d’origine, en Europe par exemple. Souvent capturés lors de leur retour (lorsque celui-ci n’est pas organisé par l’État en question), ces « anciens combattants » sont jugés et emprisonnés. En France, malgré la peine maximale d’incarcération de 30 ans, la plupart des détenus jugés pour terrorisme n’effectue que quelques années. Sortiront donc prochainement une cinquantaine d’entre eux ainsi que plusieurs centaines de détenus de droit commun, signalés comme radicalisés et ayant purgé leur peine. Bien qu’étant suivis par des services compétents tendant de plus en plus au partage d’informations, ces profils demeurent une menace.
Une stratégie de diversification
Le butin de l’État Islamique n’est pas perdu. Prenant soin de le protéger face à l’avancée de la coalition, on estime que le groupe terroriste a investi plusieurs centaines de millions de dollars dans des entreprises telles que des bureaux de change, des compagnies de taxi ou encore des entreprises d’import-export. Cette stratégie de diversification est claire : bénéficier de financement au travers de sociétés écran gérées par des intermédiaires de confiance et non par le groupe djihadiste lui-même. Cet investissement est nécessaire dans le but de financer sa politique décentralisatrice prenant plusieurs formes. La première consiste à soutenir les actions locales au Proche et Moyen Orient, la seconde, à aider l’ensemble de ses combattants et réseaux promouvant la même idéologie que lui, et enfin la troisième, au financement de la propagande par la diffusion de vidéos et autres conseils tactiques sur internet à destination des jeunes, dans le but de susciter des futures vocations. Agissant seul, le « loup solidaire », « radicalisé sur internet » est le plus dangereux et donc le plus profitable pour l’État Islamique en matière de communication.
Vers une impossible victoire ?
Comme le rappellent les spécialistes du terrorisme, la victoire définitive contre le terrorisme n’existe pas. Si l’on regarde en arrière, les pays luttant contre celui-ci, comme les États-Unis, la Grande Bretagne ou encore la France, n’ont que des victoires militaires et temporaires. Par expérience, tous les groupes djihadistes réussissent à renaître de leurs cendres d’une façon ou d’une autre pour les raisons évoquées précédemment en s’adaptant au monde actuel, comme l’atteste la communication quasi hollywoodienne des vidéos de l’֤État Islamique, inexistante il y a une dizaine d’années. Malgré la perte de ces territoires, cette capacité à frapper dans le monde entier prouve que l’EI possède d’importants moyens de communication mis en place grâce une stratégie de décentralisation bien rodée. Sa survie et son action ne nécessitent donc pas le contrôle d’une zone géographique. Ainsi, il appartient aux États de s’intéresser d’une part aux causes profondes de l’idéologie islamique et d’autre part aux raisons de la réémergence de ceux-ci depuis quelques années, profitant de la crise syro-irakienne.
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