Le vendredi 12 mars s’est déroulée la 46e prestigieuse cérémonie des Césars. Celle-ci a pour but de récompenser, depuis 1976, l’excellence des productions cinématographiques françaises. Un événement qui fait couler de l’encre depuis plusieurs jours.
Avec un discours d’ouverture qui commençait par l’évocation d’un étron, nous ne pouvions pas dire que nous n’étions pas prévenus.
La pompeuse cérémonie des César était cette année présentée par Marina Foïs, actrice favorite des réalisateurs de nanars en tout genre. Une femme mal à l’aise, insipide et inintéressante qui nous submergea en premier lieu d’une élucubration stupide sur le prétendu sexisme du mot Covid avant de se lancer dans une diatribe anti-cléricale bien convenue. Selon elle, aller à l’église dans un État laïc n’est pas de première nécessité.
Mais Marina Foïs ne fut pas la seule plaie de cette auguste soirée. Corinne Masiero, porte-parole de la démence et de l’indécence, nous fit l’honneur de son intervention. Au premier abord, elle semblait avoir confondu la cérémonie des César avec le festival du film fantastique de Gérardmer en se travestissant en peau d’âne sanguinolente digne des productions de la Hammer. Mais vient le moment de se dévoiler et de montrer au public interloqué le corps d’une femme dénudée. Un acte de transgression éculé depuis 50 ans, sorte de traditionalisme de la rébellion, dont l’objectif était de montrer que la culture était nue, « saignée à blanc » par la fermeture depuis un an !
Nous avons aussi eu droit au fabuleux discours du César du meilleur espoir masculin Jean-Pascal Zadi (Tout simplement noir). Celui-ci prenait la forme d’une litanie aux gloires immémorielles de la France que sont Adama Traoré et Michel Zecler. Ton saccadé et lecture infantile, son rôle de gagnant des César était bien décevant. Espérons qu’il apprenne son texte l’an prochain, au moins pour la gloire de ses scénaristes !
Au travers de prises de paroles aussi vides que passionnées, la 46e cérémonie des César fut en résumé un déversoir de propos convenus entre riches sans talent pour montrer leur moralité exceptionnelle. Migrants, ouïgours, féminisme et critiques gouvernementales parfois tordues étaient de sortie (blâmer des ministres qui n’ont pas de possibilité d’action est d’un ridicule insultant).
Le public, lui, était semblable à une assemblée d’automates au sourire crispé et aux applaudissements frénétiques. Pas de signes désapprobateurs majeurs à toutes ces envolées lyriques des gardiens de la bonne pensée. Certainement par peur d’être dans leurs papiers d’invectives pour l’an prochain.
Une cérémonie monotone
Pour autant, la cérémonie des César ne fut pas que cet entre-soi sinistrogyre, informe et sans âme. Certains surent rester dignes et nous donnèrent quelques moments de répit. A l’instar de Laurent Lafitte et de son brin d’humour décapant qui n’a pas plus à tout le monde mais qui était le bienvenu, de la troupe du Splendid qui remit un brin d’esprit populaire dans cette farce mondaine et grâce à l’absence de Monsieur Dupontel, prodige de la réalisation, qui a agi comme on aurait pu le souhaiter : s’abstenir de faire face à une certaine société cinématographique décadente.
De jolis moments eurent également lieu, notamment lors de la remise des prix de Fathia Youssouf (Meilleur espoir féminin ; Mignonnes), Nicolas Marié (Meilleur acteur dans un second rôle ; Adieu les cons) et Laure Calamy (Meilleure actrice ; Antoinette dans les Cévennes) qui surent rester dignes de leurs œuvres respectives en se détournant de toute influence politique, d’où qu’elle vienne par ailleurs. Chose peu surprenante par ailleurs car l’établissement de frontières politiques par des artistes est bien souvent, dans le monde du cinéma, équivalent à leur manque de talent. La fragmentation du public entre bons et mauvais est dès lors le seul moyen de transformer un être doté d’une médiocrité scénique patente en une personnalité engagée.
Mais malgré ces petits moments de grâce, ce vendredi soir fut au mieux d’une profonde platitude, au pire d’un irrespect abyssal pour la nation qui enfanta le 7ème art. Nous ne pouvons qu’espérer que les César 2022 nous éblouiront (et pas seulement du seul fait de leur générique!) et qu’ils nous redonneront envie de nous déplacer après le goût amer que nous a laissé cette pantalonnade crépusculaire.
Afin de reprendre un peu de hauteur, laissons les derniers mots de ce bref exposé de la déliquescence de l’industrie cinématographique française à Laure Calamy qui, au cours de la cérémonie César, eut ces magnifiques mots à propos de la nécessaire réouverture des salles obscures :
« Laissez-nous assouvir notre soif de sens ou de non-sens,
Laissez-nous exulter devant les œuvres d’art,
Laissez-nous nous exiler dans nos imaginaires,
Laissez-nous entendre ce qui fait de nous des êtres humains »
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