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Élections législatives 2024 : un « coup d’État » démocratique ?

Hémicycle de l'Assemblée nationale en janvier 2007. Image d'illustration. ©Parti socialiste

Ancien officier des troupes de Marine, le général Henri Roure revient sur les élections législatives de juillet 2024.

 

De nombreux Français garderont pour longtemps un goût de cendre dans la bouche. Ce deuxième tour des élections législatives a incendié ce qui restait de la cinquième République en mettant en place une assemblée élue, et donc légale, mais moralement illégitime.

Or le principe de légitimité depuis le général de Gaulle a été un des piliers de la cinquième République où le non-écrit, c’est à dire l’âme du texte constitutionnel, avait autant d’importance que les articles sur lesquels repose le fonctionnement des institutions. La communion nécessaire entre le pouvoir et le peuple après s’être lentement érodée, n’existe que difficilement.

 

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Ce qui vient de se produire est une sorte de « coup d’État » collectif conduit par une addition d’alliances dont le seul point commun est l’intérêt qu’elles ont à ne pas changer les règles d’un jeu dans lequel chacune a trouvé depuis longtemps sa place. Elles relèvent d’un même univers de compromissions que les partis qui les représentent essaient de défendre. De l’ultra-gauche à la droite LR, ils évoluent dans un même enclos, contrôlé par des arbitres ou promoteurs étrangers, où chacun essaie de duper l’autre.

Alors, lorsque des « extérieurs » risquent d’imposer un autre jeu – du moins en apparence – tous se réunissent pour conserver des règles auxquelles ils sont habitués et qui leur conviennent si bien. C’est évidemment une salade, c’est à dire une juxtaposition de produits qui ne se mélangent pas mais à laquelle il est donné un nom unitaire.

Cette association contre nature qui n’a que partiellement réussi puisque notre pays est devenu ingouvernable. Mais ils n’en ont cure, car – et c’est le deuxième point commun à cette addition d’oies, de charognards et de renards – ils espèrent pouvoir bénéficier du chaos pour accéder à la tyrannie et mettre en œuvre ce qu’ils appellent chacun leur programme.

 

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Il est vraiment étrange qu’un parti arrivé largement en tête aux élections européennes, puis au premier tour des élections législatives, se retrouve au second tour en troisième position avec moins de députés que la Gauche ou le Centre. Ce nombre de députés est de toute évidence non conforme aux 8,7 millions d’électeurs ayant voté pour lui (le plus important résultat en nombre de voix de ce deuxième tour) auxquels nous pouvons ajouter près de deux millions de voix dites « divers droite » et « extrême-droite» (selon les appellations du ministère de l’intérieur), soit un ensemble de plus de dix millions d’électeurs qui lui sont favorables ou non-hostiles.

En comparaison, l’Union de la gauche a recueilli 7,5 millions de voix (avec la divers gauche) ; le parti du président 6,3 millions et Les Républicains 1,5 millions dont il est difficile de savoir leur positionnement dans les semaines à venir.

Il fallait un « front républicain pour faire barrage à l’extrême droite ». La république n’est qu’une forme de gouvernement qui ne peut en aucun cas être confondue avec la démocratie. Les républiques populaires du monde communiste étaient bien autre chose que des démocraties. Il existe sur le continent européen 10 monarchies (auxquelles s’ajoutent le Vatican et l’Andorre, monarchies non-héréditaires) pour la plupart bien plus démocratiques que la République Française.

À cet abus de langage, ou plutôt à ce détournement du sens des mots, s’ajoute le simple fait que le Rassemblement National, contre lequel s’est élevé ce barrage, est un parti légal à l’instar de tous les autres partis déclarés. Il n’a jamais fait l’objet d’interdiction.

 

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Nous sommes revenus à un schéma du type IIIe ou IVe République. En subissant le régime des partis, les deux se sont effondrées à la suite de crises qu’elles s’avérèrent incapables de dominer. Leur impuissance, les tripatouillages et les scandales les avaient détruites. La Ve République, blessée et dénaturée depuis des années par des modifications et des interprétations indues du texte fondamental, vient de mourir. La France dans son destin a été la grande absente de ces élections législatives pourtant destinées à assurer son avenir.

 


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