Obwandiyag : un rebelle amérindien pour la France
Publié le 4/05/2019
Personnage de premier plan dans l’histoire de l’Amérique du Nord, Pontiac de son vrai nom Obwandiyag, est un chef amérindien de la tribu des Outaouais de Détroit ayant pris les armes, au profit de la France, pour la défense de la Nouvelle-France contre l’occupant anglais.
Né autour de l’année 1714 probablement dans un village de la tribu des Outaouais (nul ne connaît la date et l’endroit exact de sa naissance), la première partie de la vie d’Obwandiyag est peu connue et demeure encore aujourd’hui un mystère. Grâce à ses talents de stratège et de communicant, il devient le chef des Ottawas et chef suprême de la confédération des Algonquins des Grands Lacs (actuel nord-est des États-Unis). Bien qu’ayant participé à de nombreuses batailles contre les Anglais au côté de la France, ce n’est qu’au départ de ceux-ci qu’il apparaît réellement sur le devant de la scène.
Une situation révolutionnaire
A cette époque, la France est en guerre contre son ennemi héréditaire, l’Angleterre, sur la partie Est des Amériques (guerre de la Conquête) donnant lieu à la guerre de sept ans (première « guerre mondiale ») puis au Traité de Paris en 1763. Suite à la défaite, le royaume de Louis XV cède la Nouvelle-France, premier empire colonial Français, aux Britanniques. Privilégiant une approche diplomatique, la France avait noué des liens très étroits avec ces peuples des Grands Lacs aussi bien culturels, certains apprenant les langues et coutumes des autochtones voire se mariant avec eux, qu’économique comme le commerce des fourrures. La politique du nouvel occupant change la donne et tend à considérer les Amérindiens comme un peuple soumis. Les Anglais traitent ainsi leur ancien ennemi avec mépris et arrogance, dictent leurs règles commerciales et s’installent sur leur terre, au plus grand bonheur des spéculateurs fonciers, ce qui n’est pas au goût des nouveaux colonisés.
Le soulèvement
Obwandiyag, inspiré par les paroles du prophète Néolin – « Si vous accueillez les Britanniques, vous n’êtes pas mieux que morts. Les maladies, la variole et leur poison vous anéantiront » – organise la résistance. Cet homme grand, fort et tatoué selon les traditions Outaouaise, comprit que le danger principal ne venait pas de la France mais de l’Angleterre. Dans cette perspective, Obwandiyag crée une coalition et appelle les tribus autochtones à chasser l’Anglais, ne cessant de s’étendre sur leur territoire, et à faire revenir les Français. Remportant toute une série de victoires à partir de 1963, il écrase les britanniques dans la région des Grands Lacs et de la vallée de l’Ohio, capture des navires, intercepte des renforts anglais… L’attaque est fulgurante. Sur dix forts anglais, huit sont pris tandis que les deux autres sont assiégés. Profitant de l’effet de surprise, les Amérindiens gagnent l’ensemble des premières batailles poussant d’autres tribus à rejoindre la révolte.
Une désintégration
Malgré les demandes insistantes des chefs rebelles amérindiens ne pouvant gagner sans eux, l’aide des Français ne vient pas, ces derniers invoquant le Traité de Paris de 1763. La guerre s’enlise. Les combats suivants tournent aux affrontements sanglants où massacres, captures et nettoyages ethniques dans les deux camps deviennent la règle. Pour les Britanniques, tous les moyens sont bons pour repousser ces rebelles, quitte à introduire certaines maladies comme la petite vérole à travers des couvertures infestées remises en guise de cadeaux lors de pourparlers. Une première dans la guerre biologique. Les renforts Français ne venant pas, l’épuisement, les maladies sont autant de raisons qui épuisent la révolte et entraînent petit à petit une désintégration de l’alliance amérindienne. Après deux années de négociation, une paix est finalement trouvée en 1766. Quelques années après, le 20 avril 1769, le grand chef Obwandiyag est assassiné dans la ville de Cahokia par un jeune guerrier amérindien l’assommant avant de le poignarder. Il sera par la suite enterré sur les rives du Mississipi avec les honneurs militaires dus à son rang par des troupes françaises, commandées par le capitaine Louis Saint-Ange de Bellerive.
Un symbole
Bien qu’il soit coutume de dire que sa rébellion fut un échec, celle-ci a permis de démontrer aux nouveaux colons que les autochtones étaient encore maîtres de leur terre et souhaitaient le rester. C’est dans cette perspective qu’avant même le point culminant de la guerre, le roi Georges III prononcera la proclamation royale de 1763, affirmant les droits illimités des Amérindiens sur leurs terres et interdisant toute nouvelle colonisation au-delà des Appalaches (chaîne de montagnes à l’Ouest des treize colonies délimitant le territoire avec les Amérindiens). Cette mesure rendra furieux les marchands et spéculateurs fonciers et sera à l’origine de la révolution américaine quelques années après. La guerre d’Obwandiyag et son assassinat marquent le début de la légende de ce visionnaire voyant déjà les problèmes dont seront confrontés les Premières Nations pendant les premières générations, en particulier l’occupation de leurs terres. Ses successeurs le prendront pour modèle dans leur lutte contre la domination anglaise.
« La conquête des forts français ne donnait pas à l’Angleterre le droit de posséder le territoire et de le coloniser à leur guise. Les Français étaient venus vivre parmi les Amérindiens en frères et non pas en seigneurs. La France ne nous a jamais conquis et nous a jamais acheté nos terres ». – Obwandiyag
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