Pierre Lazareff : un des plus grands patrons de presse français du XXème siècle
Publié le 05/03/2020
Pierre Lazareff est un journaliste, patron de presse et producteur d’émissions de télévisions. Il est célèbre pour avoir fondé le journal France-Soir en 1944.
Né le 16 avril 1907 dans le 9ème arrondissement de Paris, Pierre Lazareff est le fils d’un émigré juif russe David Lazareff, courtier en pierres fines. Sa famille est naturalisée française en 1908.
Un très jeune journaliste
Le jeune Lazareff grandit dans le quartier parisien de Montmartre et étudie au lycée Condorcet. Il est très avancé pour son âge. A l’âge de 9 ans, il invente son premier journal, publie son premier article de presse à 14 ans dans le quotidien Le Peuple, journal de la Confédération générale du travail (CGT). Alors que son père le croit en classe, il résume les communiqués syndicaux qu’il va chercher à la Bourse du travail. Il n’a que 17 ans lorsqu’il devient rédacteur en chef de son propre hebdomadaire Illusion dans lequel il investit 3000 francs.
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Il côtoie les artistes de son époque et se rend dans les salons mondains. Il devient ainsi le secrétaire de la célèbre chanteuse et actrice Mistinguett puis occupe une place à la direction du Moulin Rouge. En plus de ses responsabilités dans les théâtres parisiens, il continue à collaborer dans plusieurs journaux dont le journal Paris Midi. Le milieu journalistique le surnomme déjà « Pierrot les Bretelles ». En 1925, il devient adjoint au chef de la page théâtrale du Soir. En 1931, il est nommé directeur de la publication de l’emblématique Paris-Soir, quotidien que vient de racheter l’industriel, homme politique et passionné de presse Jean Prouvost avec lequel il collabora étroitement durant près d’un demi-siècle. De ce journal, Pierre Lazareff en fera le premier grand quotidien populaire d’informations illustrées de France passant le tirage en 1931 de 200 000 exemplaires à plus de 1.3 million d’exemplaires en 1935.
Le couple Lazareff
En 1939, il se marie à Hélène Gordon, jeune fille d’un riche homme d’affaires russe réfugié en France au moment de la Révolution de 1917. Depuis son voyage au Niger en 1935, elle se passionne pour le journalisme. Il lui confie une rubrique pour enfants à succès dans Paris Soir Dimanche, premier journal du dimanche français.
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La seconde guerre mondiale arrive et le couple se réfugie à New-York. Cet épisode sera une véritable traversée du désert pour lui qui ne parle pas l’anglais contrairement à sa femme réputée polyglotte. Les États-Unis sont pour elle source d’épanouissement, elle signe de nombreux articles sur la mode et la vie mondaine newyorkaise. Cet épisode sera aussi pour le couple le début des difficultés : Sa femme multipliant les relations extra conjugales au plus grand désespoir de son mari.
Retour en France
Il est envoyé à Londres où il dirige les émissions radiophoniques à destination de l’Europe occupée. Fin 1944, il revient en France, pressé de reprendre son activité à Paris soir. Il est aussi embauché fin 1944 par le groupe résistant qui édite son propre journal Défense de la France. Les difficultés financières de ce journal l’amènent à écarter l’équipe fondatrice et à rebaptiser son journal France-Soir. Son réseau et son talent lui permettent de faire venir les plus belles plumes de l’époque comme Joseph Kessel, Lucien Bodard ou encore Paul Gordeaux.
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Sa femme revenue des États-Unis 8 mois après son époux, fonde un nouveau magazine féminin Elle. Située deux étages au-dessus de celui de son mari, elle règne en véritable « Tsarine » sur son magazine. Le couple devient ainsi deux poids lourds du monde journalistique français avec deux rédactions communiquant très peu entres elles.
Le succès de France-Soir
En 1949, France-Soir est racheté par l’éditeur Hachette. Les années passent et le journal devient le quotidien le plus vendu en France. A partir de 1953, il tire près d’un million d’exemplaires par jour avec 7 éditions. Le succès est au rendez-vous. Avec plus de 400 journalistes, il atteint jusqu’à 2 millions d’exemplaires en 1970. L’objectif de la rédaction : faire vrai et faire simple.
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En 1952, les Lazareff s’installent à Louveciennes au domaine de « La Grille Royale ». Dans cette propriété, le couple y reçoit à déjeuner l’ensemble de la sphère médiatique de l’époque (politique, artistique, littéraire…). Ces « déjeuners du dimanche » deviennent célèbres dans le tout Paris. Commencés à 13h, ils ne se terminent généralement pas avant 19h avec promenades et jeux de cartes.Ce couple de journalistes apprécie ces moments si importants permettant de recueillir beaucoup d’informations.
En 1960, il prend la tête d’un nouvel hebdomadaire Télé 7 jours qui succède à Télé-60. Les tirages explosent et le magazine dépasse le million d’exemplaires 3 ans plus tard en 1963, puis les deux millions en 1965 avant de devenir dans les années 1980, le plus fort tirage de la presse française. En 1959 a été créée la première émission télévisée d’informations et de reportages Cinq colonnes à la une. Le succès de l’émission est total.
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A partir des années 60, Pierre Lazareff n’arrive plus à suivre les évolutions de la société française, la crise de mai 68 en est le symbole. Son style de management n’est plus adapté aux rédactions de l’époque. Atteint par un cancer, il reste à la tête de France-Soir dont le tirage ne cesse de décliner. Pierre Lazareff meurt le 21 avril 1972 d’un cancer. Le monde de la presse lui rendra un hommage unanime.
Il est enterré à Paris au cimetière du Père-Lachaise.
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