Pierre Schoendoerffer : le cinéaste de guerre
Publié le 04/11/2019
Pierre Schoendoerffer est un romancier, réalisateur, documentariste et scénariste français. Lauréat de l’Académie française, il est le réalisateur de films à succès tels que La 317ème section, Le Crabe-tambour ou encore Diên Biên Phu.
Né le 5 mai 1928 à Chamalières dans le Puy-de-Dôme, Pierre Schoendoerffer est l’avant dernier d’une famille de cinq enfants. D’origine alsacienne, son père est ingénieur de l’Ecole centrale et travaille chez Michelin à Clermont-Ferrand. Durant la seconde guerre mondiale, sa famille déménage à Annecy. C’est au lycée que le jeune Pierre se prend de passion pour Fortune Carrée, roman du journaliste et aventurier Joseph Kessel dans lequel il trouve la passion de l’aventure. Son rêve est de devenir marin.
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Cinéaste de guerre en Indochine
Un temps passionné par la mer, il s’engage à 19 ans à bord d’un caboteur suédois comme matelot avec lequel il navigue principalement en mer Baltique et en mer du Nord. Son service militaire l’oblige à rentrer en France. En lisant la presse, il apprend le décès d’un caméraman de l’armée découvrant ainsi l’existence du service cinématographique des armées. Il décide de se porter volontaire pour le « remplacer ». Brièvement formé au fort d’Ivry, il part en Indochine en 1952 comme opérateur pour le Service Cinématographique des Armées (SCA). Son statut lui permet de voyager sur les différents théâtres d’opérations militaires français en Indochine. Il filme la réalité de la guerre jusqu’à sa capture en 1954 à Diên Biên Phu, bataille qui marque la fin de la colonisation française en Asie. Comme plus de 11 000 soldats, il subira les camps de rééducation du Viêt Minh.
Des débuts difficiles au cinéma
Libéré à l’été 1954 et démobilisé sur place dans la foulée, il reste en Indochine où il devient photographe pour Paris-Match notamment. Il décide d’achever son tour du monde en rentrant en France par l’Est. De retour en métropole, il devient journaliste et voyage au Maroc et en Algérie qui commence à connaître quelques tensions. Lors d’un séjour à Hong-Kong, il rencontre Joseph Kessel – son idole de jeunesse – qui accepte de l’aider dans le monde du cinéma encore fermé. Grâce à lui, il tourne en 1956 en Afghanistan le film documentaire que Joseph Kessel a écrit : La Passe du diable. Le film ne sort commercialement qu’en 1958.
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La même année, Pierre Schoendoerffer réalise Ramuntcho puis en 1959, Pêcheur d’Islande. Ces deux films ne rencontrent pas l’effet escompté mais le producteur – fasciné par le parcours de son réalisateur – tient bon. En 1963, il écrit La 317e section. L’adaptation cinématographique sort en 1965. Le film qui met en scène une section de l’armée française durant la guerre d’Indochine est un succès. En revanche, les conditions de tournage ont été rustiques. « J’ai imposé à tout le monde la vie militaire, dira le cinéaste. Un film sur la guerre ne peut pas se faire dans le confort. Tous les matins, nous nous levions à 5 h et nous partions en expédition à travers la jungle. Nous étions ravitaillés par avion toutes les semaines. La pellicule était expédiée à Paris dans les mêmes conditions. De là-bas, on nous répondait télégraphiquement ‘Bon’ ou »Bon’ ». Le film obtient le prix du scénario au Festival de Cannes en 1965.
Un réalisateur et écrivain reconnu
A partir de cette époque, Pierre Schoendoerffer se fait connaître. En 1967, son film documentaire La Section Anderson qui raconte la vie d’une section de marines engagée au Vietnam, remporte en 1968 l’Oscar du meilleur film documentaire. En 1969, il reçoit le prix Interallié pour L’Adieu au roi. Le scénariste John Millius le portera à l’écran en 1989 et s’en inspirera grandement lorsqu’il écrira Apocalypse Now en 1979. En 1976, son roman Le Crabe-tambour obtient le grand prix du roman de l’Académie française. Adapté au cinéma l’année suivante, le film reçoit trois Césars en 1978.
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En 1992, c’est au tour de son film Diên Biên Phu de sortir. Tourné au Vietnam avec la participation de l’armée vietnamienne, il est son film le plus ambitieux. Là-haut, un roi au-dessus des nuages, vient couronner son œuvre de l’empire colonial français déchu. En 2007, il s’envole pour l’Afghanistan – un demi-siècle après le tournage de La Passe du diable – sur invitation du 1er régiment de chasseurs parachutistes (1er RCP) dont il est le soldat de 1ère classe d’honneur. Pierre Schoendoerffer décède le 14 mars 2012 à l’hôpital militaire de Percy suite à une opération chirurgicale quelques jours auparavant. Un hommage lui est rendu le 19 mars – jour de son parachutage sur Diên Biën Phu – aux Invalides. Il repose à la division 17 du cimetière de Montparnasse à Paris.
Critique du personnage
Pierre Schoendoerffer est souvent critiqué pour le lien constant de son œuvre à ses souvenirs de guerre. « J’ai connu la misère de l’homme. Les trois quarts de mes camarades sont morts. Et pour cela, je reste à jamais leur débiteur ». L’axe central de son œuvre réside dans la perpétuation cinématographique du même thème légitimé par son statut de témoin des événements. Comme l’explique la spécialiste du cinéma de guerre et des représentations coloniales et postcoloniales Delphine Robic-Diaz, le cinéma de Pierre Schoendoerffer « finit par prendre la forme d’une spirale égocentrique concentrée autour de la figure du témoin, dont les manifestations redondantes limitent la portée collective […] La guerre d’Indochine n’est pas un sujet qui intéresse les Français. C’est une guerre trop lointaine […] chronologiquement coincée entre la Seconde Guerre mondiale et la guerre d’Algérie, conflits plus préoccupants pour les métropolitains ».
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Pierre Schoendoerffer est le porte-parole de cette armée de disparus, perdants d’une épopée coloniale souvent méconnue des Français.
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